QU'EST-CE QU'UN ÉLEVEUR FÉLIN ?

 

Certains critiquent les éleveurs. La plupart des gens croient que nous élevons des chats pour nous faire de l'argent sur leur dos et ne voient que la base : nous mettons les femelles au mâle et nous engrangeons l'argent. La réalité, notre réalité, est tout autre. De nombreuses personnes viennent frapper à notre porte pour devenir éleveurs à leur tour. Elles veulent connaître la merveilleuse aventure des naissances. À celles-là, nous répondrons par la cultissime réplique de Gandalf : « Fuyez, pauvres fous ! ». Il est temps d'abroger les mythes, d'éclairer les tabous. L'élevage, c'est la merveilleuse aventure des naissances, mais pas seulement.

L'éleveur a renoncé aux grasses matinées parce qu'il y a toujours un chat qui réclame un câlin / veut à manger / joue aux aurores.
À certaines périodes, l'éleveur a renoncé à dormir dans un lit : il dort par terre, aux côtés d'un chat malade ou d'une mère sur le point d'accoucher... s'il dort.
Parfois, il renonce même à son lit parce qu'une mère y a élu domicile. Ou la meute de chats au grand complet... ce qui revient au même.

L'éleveur doit se trouver un emploi qui finance sa passion et lui laisse assez de temps libre pour jouer les nounous.
Mais son véritable travail commence au retour à la maison, lorsqu'il faut s'occuper des chats.
L'éleveur dépense sans compter pour le bien-être de ses animaux.
L'éleveur se prive souvent pour subvenir aux besoins de ses chats avant de subvenir aux siens.
L'éleveur n'est pas un vendeur. C'est une mère, un père. Ne lui demandez pas de vous considérer comme un roi : les rois chez lui, ce sont ses chats et vous n'êtes pas son client, vous êtes la future mère ou le futur père de ses chatons.

L'éleveur ne part pas en vacances parce qu'il faut du cat-sitting et qu'il est hors de question qu'il abandonne ses chats à une pension. S'il a une famille, toute la famille ne partira pas.
L'éleveur n'a une vie sociale qu'à certaines périodes, lorsque les chatons ont grandi, lorsque les chats ne sont pas malades, lorsque...
S'il finit par avoir une vie sociale, l'éleveur se décommande souvent pour une urgence, écourte ses vacances ou limite la durée de ses sorties au strict nécessaire sous le même et unique prétexte : « J'ai des chats, il faut que je rentre ».
De toute façon, l'éleveur n'a presque pas d'amis... à part les quelques personnes qui lui ressemblent et le comprennent et quelques adoptants qui ont compris son égoïste besoin d'avoir des nouvelles de ses bébés.
L'éleveur estime que son temps libre sert à s'occuper de ses chats, tout le reste est une corvée. D'ailleurs, quand on lui fait remarquer qu'il faudrait prendre un peu de temps pour lui, il répond invariablement que s'occuper de ses chats, C'EST du temps pour lui.

L'éleveur est souvent vêtu de vêtements amples et troués ou pleins de fils tirés. Il évite les jupes et les jeans à cause des chatons qui grimpent le long des jambes, évite les dos-nu ou les épaules tombantes à cause des adultes qui lui sautent sur le dos.
L'éleveur ne sent pas toujours bon. Sa maison non plus d'ailleurs.

L'éleveur pleure pour un chat dont il doit se séparer comme s'il n'en avait qu'un et si vous le lui faites remarquer, il vous répondra « Oui, mais lui / elle, ce n'est pas pareil », parce qu'à ses yeux, aucun chat n'est semblable aux autres.
L'éleveur parle des chats en général et de ses chats en particulier avec tant de passion qu'il est intarissable sur le sujet, au point que vous avez l'impression qu'il n'a que ça dans sa vie (et c'est souvent le cas).
L'éleveur parle à ses chats comme s'ils le comprenaient (et c'est le cas... vous en doutiez ?).
L'éleveur parle bien sûr le chat très couramment.

L'éleveur étudie durant toute sa vie pour améliorer sa race, mais aussi pour comprendre intégralement le fonctionnement de cet être mystérieux qu'est le chat : génétique, santé, alimentation, reproduction, tout y passera.
L'éleveur met tout son cœur, son temps, son cerveau et ses finances au service de son élevage.
L'éleveur est un être à part, qui n'a pas une vie normale aux yeux des autres (si vous en doutez encore, relisez...).
L'éleveur fait des sacrifices quotidiens, durant tout le mois, de toute l'année, de toute sa vie... et après sa mort, parce qu'il a neuf vies, comme ses chats.

L'éleveur supporte quotidiennement l'ignorance des gens qui ne comprennent pas sa passion ou ne la partagent pas et se fait un devoir d'éduquer.
L'éleveur supporte les a-priori de ceux qui croient qu'il fait beaucoup d'argent, alors qu'il est continuellement dans le rouge et qu'il vend un chaton bien en deçà du prix qu'il a déboursé pour lui.
L'éleveur aura refusé jusqu'à cinquante candidatures d'adoptants avant de laisser partir un seul chaton. Il préfère garder son bébé à la maison que de le laisser partir dans une mauvaise famille.
L'éleveur supporte quotidiennement la bêtise des gens qui rabaissent, critiquent ou font n'importe quoi avec sa race. S'il sait qu'il s'agit d'une cause perdue, il n'en luttera pas moins comme si sa vie en dépendait contre ces personnes.
L'éleveur peut paraître dur, froid ou réservé, mais il n'a à cœur que le bien-être de ses chats.
L'éleveur supporte la critique des gens qui ne comprennent pas sa passion ou ne la partagent pas, parfois même parmi ses proches.
L'éleveur se fait trainer dans la boue continuellement par d'autres éleveurs qui le jalousent ou n'aiment pas sa façon de voir les choses. À ce titre, il se fera plus d'ennemis qu'il ne comptera de victoires dans sa vie.

L'éleveur doit se plier à des règles strictes d'hygiène, de finance, de morale qu'il est souvent le seul à s'imposer.
L'éleveur doit rendre des comptes, à ses amis, à sa famille, aux autres éleveurs, aux associations félines, aux impôts, aux familles adoptantes.
L'éleveur passe plus de temps chez le vétérinaire pour un chat que chez le médecin pour lui-même.
L'éleveur s'inquiète du moindre éternuement, de la moindre paupière close, vérifie trois-cents fois par jour l'état d'une femelle à la veille d'accoucher et dix mille fois comment vont des chatons nouveaux-nés.
L'éleveur essaye de dépister plus de maladies chez son chat qu'il n'en considère inquiétantes pour lui-même.

L'éleveur choisit mieux la nourriture qu'il donne à ses chats, examine avec plus d'attention la liste des ingrédients et des nutriments de la nourriture féline que de la sienne. Il n'hésite ni à y mettre le prix, ni à prendre son temps.
Si l'eau du robinet ne semble pas convenir à ses chats, l'éleveur n'hésitera pas à leur acheter de l'eau embouteillée, et continuera, lui, à boire l'eau du robinet.
L'éleveur est plus maniaque de la propreté pour le lit d'une mère et de ses bébés que pour son propre lit. À moins que la-dite mère ait élu domicile dans son lit, bien sûr !

L'éleveur pleure de joie le jour où naît un héritier ou une héritière tant attendu(e)... Mais il pleure aussi les nichées qui périssent sans qu'il ne puisse rien y faire. Lorsqu'un chaton meurt, il vérifiera le bien-être du reste de la nichée deux fois plus souvent que d'habitude (c'est-à-dire vingt mille fois par jour).
L'éleveur pleure les mères qui décèdent à l'accouchement, les retraités qui se cachent pour mourir, les chats discrets comme ceux qui lui ont tout donné... Mais il se relève et recommence.

Mais, plus important que tout : l'éleveur a choisi cela en son âme et conscience. Il n'échangerait donc sa vie contre celle d'aucun autre et est très heureux ainsi. Tout ce qui lui importe, c'est de partager avec quelques rares élus l'Amour qu'il porte à ses chats. Parce que ses chats lui ont tant appris, il s'efforcera de vous offrir un compagnon inestimable. L'éleveur s'attend toujours à ce que votre nouveau compagnon change votre vie comme des générations de chats ont changé la sienne avant la vôtre.